Le numérique : y aller ou pas encore ?

“A l’heure actuelle, nous avançons ! Pour autant le numérique a ses avantages et ses inconvénients” explique Michel Bastide, prothésiste dentaire et responsable général du Dental Forum. Actuellement, deux possibilités s’offrent à l’orthodontiste : acquérir un scanner d’empreinte (empreinte qu’il va numériser) ou acquérir une caméra intra- buccale qui va permettre de numériser également directement en bouche.

Se posent alors des questions de qualité. Par exemple, alors que les anciennes caméras nécessitaient un poudrage, les nouvelles en revanche n’en ont pas besoin. Et, « c’est un grand pas en avant ! » précise-t-il. À l’époque un cordonnier ou un menuisier transmettait ces outils de père en fils, désormais des générations de praticiens changent d’outils plusieurs fois dans une seule et même génération. Car la (r) évolution numérique est en marche.

C’est ce qu’explique notamment Richard Abulius, auteur de l’ouvrage « Atlas de prothèse implantaire »: « alors qu’à l’heure actuelle le scanner ne sait pas lire à travers la salive et le sang, dans un avenir proche nous aurons des scanners avec des sonars (il s’agit du même principe que pour les sous-marins). Et ces sonars permettront de lire à travers la salive. Cela sera encore une nouvelle étape ».

L’idée depuis toujours était bien d’avoir une image dès que l’on met la caméra en bouche. Mais il se pose également la question de son coût. Que choisir ? On estime le coût d’un modèle numérique à peu près, une vingtaine d’euros tandis qu’un modèle en plâtre revient à 7 euros (temps-homme non compris). Quant à l’investissement pour le système, si l’on ne veut pas faire de concessions, les tarifs d’achat s’établissent à plusieurs dizaines de milliers d’euros.

Les prothésistes dans les starting-blocks

Aujourd’hui 70 % des laboratoires se sont dotés de matériel numérique. Une réelle évolution qui influe notamment sur l’exercice de la profession de prothésiste. En effet, la haute technologie, la robotique et les techniques informatiques assistées par ordinateur CAO et CFAO y ont largement participé.

C’est ce que raconte notamment Michel Bastide : « techniquement aujourd’hui, le praticien doit changer ses habitudes. Par exemple, la caméra est un très bon outil mais il faut que le praticien sache travailler avec sachant qu’il faut environ 8 mois pour la maîtriser. C’est donc une option qui remet en cause beaucoup de choses. Chaque caméra parle son langage et il faut donc savoir l’apprivoiser ». Pour autant, cette nouvelle technologie pose aussi la question de son utilisation et donc de son apprentissage.

Il poursuit : « actuellement certains praticiens achètent des outils mais ils ne sont pas assez formés. Il me semble donc, qu’il faille se repositionner sur les fondamentaux. Il faut de vraies formations en adéquation avec le matériel. Aujourd’hui, on va utiliser l’outil à 10 % à peine de ses capacités alors qu’en implantologie, la formation a été faite à tous les niveaux : le praticien et les laboratoires. Conséquence : le taux de réussite de la pose implant a été d’environ 98 % très rapidement. Ce n’est malheureusement pas le cas pour le numérique en ce moment ».

Selon Richard Abulius, « Il faut former les praticiens puis former également les formateurs. Et cela prend du temps. Pour autant, doter son cabinet de matériels propres à la numérisation est tout à fait possible. Les praticiens pourraient par exemple s’équiper du serveur NAS qui peut avoir plusieurs disques durs de capacités différentes et qui permet une sauvegarde automatique et un stockage en toute sécurité. C’est beaucoup plus fiable que des empreintes en plâtre rangées dans un placard et qui tomberaient les unes sur les autres. Techniquement, les praticiens savent que cela existe mais ils ne savent pas forcément quels choix faire ».

Au final, la suffisance des gains et le prix du matériel peuvent apparaître parfois comme des freins au développement du numérique. Pourtant cette nouvelle technologie présente de nombreux points positifs. Selon Richard Abulius, auteur notamment de l’ouvrage « Atlas de prothèse implantaire » : « le numérique permet de stocker beaucoup plus facilement. C’est indéniable. Aujourd’hui, les cabinets dentaires qui travaillent avec le numérique ont une meilleure qualité par rapport au travail manuel. L’ajustage, la fonctionnalité sont largement supérieurs en numérique qu’en manuel. L’avenir est bel et bien tourné vers le numérique ».

Un défi à relever

Dans les faits, il s’agit d’une véritable révolution numérique mais « il faut savoir la maîtriser » relate Michel Bastide, prothésiste dentaire. Puis il poursuit, par exemple, « aujourd’hui, 98 % de ma production est en CFAO. Nous travaillons sur tous types de matériaux. Mais sur certains cas, cela doit être revu. Pour arriver à piloter ces Formules 1 il nous a fallu un long apprentissage. Aujourd’hui, nous assistons clairement à un manque de formation mais le numérique bien formé reste le meilleur moyen de faire de bonnes empreintes ».

Techniquement, le numérique présente de nombreux points positifs. Il permet indéniablement d’aller plus loin dans l’utilisation de nouveaux matériaux comme en atteste par exemple « le peek » : une fibre très sophistiquée, fabriquée grâce à un procédé de filage par fusion, et il en est de même pour la zircone. La numérisation permet au praticien la validation de la forme de la préparation, du parallélisme et de la lisibilité des limites par une image grossie.

De plus, la rapidité du geste de capture est sans commune mesure avec le temps demandé par une empreinte physique. Il est possible d’enregistrer un provisoire ou un mock-up. Sur le marché, il existe également des produits très performants. L’un des reproches que l’on entend parfois à propos du numérique est notamment de ne pas arriver à sortir des empreintes d’une qualité traditionnelle.

Cependant, « les fichiers numériques limitent les risques d’erreur et les pertes d’informations. L’empreinte Sirona par exemple et sa plate-forme sont tout à fait performantes, explique Michel Bastide, prothésiste dentaire. Alors que les empreintes sont en silicone, il arrive à certains prothésistes de reprendre le modèle manuellement pour supprimer les irrégularités. » bien que certains prothésistes assènent aujourd’hui que « l’on n’arrive pas à sortir des empreintes d’une qualité traditionnelle ».

Le numérique resterait le meilleur moyen de faire de bonnes empreintes. Enfin, Michel Bastide de conclure : « les nouvelles générations commencent à être formées sur le numériqu

e. Le jour où les étudiants sortiront des facultés avec des caméras se sera gagné ! Il y a des super produits aujourd’hui sur le marché et il ne faut pas s’en priver et l’arrivée de nouvelles caméras comme la « Condor » de Biotech va révolutionner cette technologie ».