Océan dentiste : « donner une image positive de la profession aux enfants du monde entier »
Il y a trois ans(1) vous vous prépariez pour votre tour du monde, où en êtes-vous ?
Antoine Gloanec : Nous avons commencé par nous rendre dans quinze villes-étapes en France métropolitaine, avant de partir à l’étranger. Aujourd’hui, notre première phase est terminée. Nous venons d’achever une « grosse boucle » effectuée dans onze pays dont les États-Unis, le Canada, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Vincent, la Dominique, Saint-Martin, les Îles Vierges britanniques, Puerto-Rico, l’Espagne ou encore le Portugal. Nous sommes rentrés en Bretagne en août 2018. Notre bateau est actuellement dans la ville de Saint-Brieuc entre les mains des étudiants de la faculté de Rennes, qui s’exercent dessus pendant que nous préparons la suite du projet.
Quels sont vos souvenirs les plus marquants ?
Antoine Gloanec: Il y en a tellement… Arriver à New York en bateau, c’est grandiose ! Nous avons aussi accosté dans plusieurs îles récemment dévastées par les cyclones, comme la Dominique, Saint-Martin… c’était impressionnant. Le pire ce sont les Îles Vierges britanniques : je pense qu’il leur faudra au moins dix ans pour tout reconstruire. Notre démarche a permis aux habitants de découvrir quelque chose d’original, de nouveau, malgré la difficulté de leur quotidien. Il est d’ailleurs intéressant de constater que ce n’est pas forcément dans les pays les plus pauvres que les dents sont les plus abimées !
Lors de notre escale dans les écoles dominicaines par exemple, malgré le chaos alentour, nous avons constaté que les enfants sont très rigoureux. Ils portent l’uniforme, et cette discipline générale se ressent également sur leur hygiène bucco-dentaire. Les attitudes autour de l’hygiène dentaire varient souvent d’un pays à l’autre. Parfois, j’ai l’impression que le coût de la santé influe sur l’efficacité de la prévention.
Au Canada, par exemple, une séance annuelle est dédiée à la santé bucco-dentaire, dans toutes les classes, et une à deux visites annuelles chez le chirurgien-dentiste sont rendues obligatoires par les assurances privées.
Comment réagissent les enfants à votre action ?
A.G. : Leurs questions peuvent être drôles : On nous a déjà demandé si nous brossions les dents des requins ! Les enfants sont généralement extrêmement intéressés par ces sujets, car ils ont de nouvelles dents qui poussent… Nos interventions sont parfois trop courtes : nous n’avons qu’une demi-heure par classe, et chaque élève veut raconter son histoire ou celle de son grand-père qui perd ses dents ! Ce qui est certain, c’est que notre action laisse une image positive de la profession aux enfants, peut-être que cela créera des vocations… J’espère surtout qu’ils auront moins peur du dentiste !
Avez-vous déjà envie de repartir ? Quels sont vos futurs projets ?
A.G. : Nous aimerions entreprendre un grand tour du monde dans le Pacifique, en Afrique, Haïti… Nous voudrions aussi emmener des étudiants en chirurgie dentaire avec nous, développer d’autres actions… mais tout dépend réellement du financement. Plus de 50 % du projet est financé avec nos fonds propres, ce qui avait du sens quand ce n’était qu’une aventure familiale… Mais si nous voulons pérenniser ce projet, il y a un modèle économique à trouver. Cela passe par des partenaires, qui y ont participé à petite échelle comme Henry Schein qui nous a aidé à installer le fauteuil, ou Philips Sonicare qui nous a fourni en brosses à dents connectées. Mais nous avons besoin de plus. Une opération comme la nôtre coûte 150 000 euros par an.
Propos recueillis par Kessy Huebi-Martel
(1) Lire interview de 2015 sur https://bit.ly/2PggVQD
Brosser les dents de la mer…
Lors de ses visites dans les écoles, le Dr Antoine Gloanec explique qu’il se déplace en bateau et que ceux qui le souhaitent sont les bienvenus à bord de son voilier-cabinet. Le chirurgien-dentiste apprend aux enfants à se brosser les dents, ou vérifie qu’ils savent bien le faire, et les redirige vers leurs dentistes habituels, si une carie est suspectée. Un bilan bucco-dentaire est remis à chaque enfant avec des recommandations, comme celle de consulter un chirurgien-dentiste au moins une fois par an pour un contrôle