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Progresser grâce au mentorat

Les relations que vous tissez avec les patients figurent parmi les plus grandes récompenses que l’art dentaire peut offrir. Celles que vous nouez avec les confrères qui vous accompagnent ne sont pas moins importantes. Les chanceux qui ont fait la rencontre d’un mentor durant leur parcours universitaire ou en début de carrière le savent bien. Les autres, quant à eux, ont été contraints de naviguer en solitaire dans un univers parfois hostile où il est parfois difficile de prendre les bonnes décisions.

Installée à Châlons-en-Champagne, le Dr Diane Oget-Evin a eu la chance d’être accompagnée par le Dr Philippe Russe. Une rencontre due au hasard. Lorsqu’en 2007, la praticienne entre en troisième année, elle postule chez des chirurgiens-dentistes. « Pas pour exercer, mais pour faire du secrétariat ou les petites tâches du quotidien. » Elle cible des praticiens à proximité de chez elle. Un jour, un courrier lui revient positif. Bonne pioche ! Il s’agit du directeur de l’Institut implantaire de Reims et conférencier reconnu en chirurgie buccale. Le Dr Russe connaît le parcours de Diane et lui propose de devenir assistante dentaire, ce que l’Ordre accepte. « J’ai immédiatement apprécié l’ambiance du cabinet et j’avais la sensation de me rapprocher un peu plus de la chirurgie, mon objectif. » En matière d’apprentissage, la parole prime. Tant mieux, le Dr Russe est loquace. De nature modeste, la transmission de son savoir lui importe et il fait preuve d’une grande générosité en matière d’explications. Diane épaule le conférencier durant ses interventions. Elle écoute et regarde. « Il s’agissait pour moi de cours particuliers très précieux, nous échangions et je le questionnais sur ses protocoles. Lorsque les patients étaient sous anesthésie générale, nous pouvions commenter sans aucune retenue l’intervention en cours. » Le Dr Russe répète ses chorégraphies avec un contrôle parfait. Admirative, Diane enregistre, « lorsqu’on observe trente fois le même geste, il s’intègre à notre mémoire, aujourd’hui encore j’ai parfois l’impression de reproduire ce que j’ai vu ».

Qu’est-ce que le mentorat ?

Il s’agit d’un accompagnement et d’une aide au développement personnel et professionnel réalisés par un professionnel, le mentor. Ce dernier s’appuie sur son expérience et ses compétences pour réaliser sa mission. L’objectif étant d’amener le mentoré à avancer par lui-même tout en restant à son écoute et prêt à lui distiller quelques pistes ou conseils.

Une aide pour passer des caps

Le mentor est un praticien qui accepte de vous accorder du temps au-delà de son carnet de rendez-vous. La plupart du temps, le mentorat est un échange : en tant que mentoré, vous héritez de conseils liés à l’expérience ; quant au mentor, il perfectionne ses compétences en leadership et en formation grâce à ce compagnonnage. De nombreux chirurgiens-dentistes décident de devenir mentor après avoir eux-mêmes bénéficié d’un mentorat qui leur a permis de satisfaire leurs ambitions. Peu importe le domaine d’activité, il est bon de rappeler que les mentors ne facturent jamais leurs services, ils en font profiter.

Si le point de départ de la première rencontre s’inscrit le plus souvent dans un cursus de formation, la relation qui unit le mentor et ses « protégés » dépasse rapidement ce cadre formel.

C’est en bénéficiant des enseignements du DU de Paris VII en implantologie que le Dr Jonathan Gucciardi a noué des contacts qui ont modifié le cours de sa carrière. « Ces deux années m’ont énormément apporté. Un esprit de famille règne sur les différentes promotions du diplôme. » D’ailleurs, cet esprit de groupe a encouragé Jonathan à repousser ses limites. Il faut souvent s’imposer de nouveaux défis pour voir sa pratique évoluer et ce challenge est quasi impossible lorsque l’on est seul. « Avant le DU, la chirurgie composait 30 % de mon activité. Elle représente aujourd’hui 100 % de mes journées car j’ai réussi à passer certains caps. Au-delà des cours, l’accompagnement de l’équipe a été fondamental. Les Drs Guillaume Drouhet, Olivier Fromentin ou Isabelle Kleinfinger ont considérablement boosté ma confiance, ils m’ont permis de me surpasser. »

Origine d’un mot

D’où vient le mot « mentor » ? Plusieurs histoires racontent son origine. Dans l’Odyssée contée par Homère, on y retrouve l’histoire d’Ulysse et de Télémaque, son fils. Ulysse était roi de deux îles de la mer Ionienne. Lorsqu’il part à la guerre, il confie son fils à son ami de confiance « Mentor » et le charge de son éducation et de la gestion de son domaine. Ce vieil homme joue le rôle de précepteur pour le jeune Télémaque. « Mentor » a été rendu célèbre lors de la parution des Aventures de Télémaque, un roman écrit dans les années 1694 par Fénelon.

L’envie d’aller plus loin

Si à la lecture de cet article vous pensez ne pas avoir eu de chance dans votre cheminement professionnel car vous n’avez pas de mentor, sachez qu’il n’est peut-être pas trop tard !

Le Dr Nicolas Cocco installé à Haguenau dans le Bas-Rhin a exercé plus de quinze ans avant de rencontrer des confrères qui ont changé sa destinée, les Drs Matthieu Collin et Mathieu Chautard du centre de formation « 4 your smile ». « Cela peut sembler bizarre, mais pour la première fois j’ai vu des conférenciers qui me ressemblaient. Je me suis reconnu en eux. Ils sont décontractés et de la même génération que moi. Ils semblaient autant animés par le désir d’accroître leurs compétences que de les partager. Nous avons commencé à échanger sur les réseaux sociaux, un premier lien s’est créé. » Peu de temps après, Nicolas se rend chez le binôme à La Ciotat pour assister à leur stage sur les réhabilitations complètes. « J’ai compris que quelque chose dans ma carrière venait de se passer. Ces rencontres allaient me porter. Je suis désormais rempli de nouvelles aspirations et je trouve avec ce réseau professionnel de quoi satisfaire mes envies. À 42 ans, j’ai enfin des mentors qui me donnent envie d’aller plus loin. »

3 questions au Dr Ronen Kurower

 » Je ne veux pas être un gourou « 
Le mentorat peut-il réellement changer une carrière ?

Je n’ai malheureusement pas eu la chance de croiser un mentor pour me guider dans mes choix ou apprendre à son contact. J’ai donc perdu beaucoup de temps et d’énergie pour trouver ma voie et parfaire ma formation. C’est pourquoi je reste persuadé que le mentorat peut réellement changer une carrière et donc, je n’hésite pas à m’investir auprès de ceux qui m’en font la demande.

Quelle est votre motivation quand vous conseillez des confrères ?

J’ai eu la chance de satisfaire mes objectifs de carrière. J’ai beaucoup travaillé pour y parvenir, je me suis aussi énormément renseigné, notamment en lisant des livres. Tout ce que je crée aujourd’hui a vocation à servir les autres. Si à mon niveau je peux aider les praticiens en partageant des idées, j’en suis heureux.

Comment appréhendez-vous la relation avec eux ?

Je ne veux pas être un gourou, je ne professe rien à longueur de journée. En revanche, si on me demande des accompagnements, j’accepte la mission. J’interviens pour le groupe Edmond Binhas sur le thème du développement personnel, notamment sur la question de l’équilibre entre la vie au cabinet et la vie personnelle. Je garde contact avec les volontaires qui veulent aller plus loin dans leur accomplissement. Aujourd’hui, les différents moyens de communication nous permettent d’entretenir des relations sur la durée. Chacun doit pouvoir avancer à son rythme.

Comment profiter pleinement de votre mentor ?

Planifier des rencontres formelles

Peu importe leur fréquence, mais créez de véritables moments d’échange où vous abordez vos doutes, vos projets mais aussi vos craintes. Les mots ont une grande valeur dans le compagnonnage. Les images ne suffisent pas, même lorsqu’on passe des heures au fauteuil avec son mentor.

S’inspirer sans copier

Essayez de faire aussi bien que votre mentor, mais sans le copier. Il est là pour vous aider à vous façonner sans vous réduire à un état de clone. D’autant que votre mentor ne peut pas être parfait, il a lui aussi des défauts à corriger.

Apprendre à se détacher

Les mentors sont une rampe de lancement, mais rien n’est éternel. Le jour viendra où vous apprendrez plus ailleurs. Et tant mieux ! C’est peut-être aussi le moment où des regards plus jeunes sur votre pratique vous aideront davantage. À votre tour de vous remettre en question et de devenir mentor !