Signes de maltraitance chez les enfants : comment les reconnaître ?

En Europe, 18 millions d’enfants sont victimes d’abus sexuels, 44 millions de violences physiques et 55 millions de violences psychologiques, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). En France, un enfant meurt chaque semaine sous les coups de ses parents et 160 000 sont victimes chaque année de violences sexuelles, dont 77 % au sein de leur famille. Ces chiffres mettent en évidence l’importance pour les professionnels de santé d’être attentifs aux signes pouvant indiquer des cas de maltraitance infantile. Statistiquement, il est certain que de jeunes victimes se présentent en consultation au cabinet dentaire.

Certains signes peuvent vous alerter

Les enfants sont sujets à des bosses, des égratignures ou des chutes occasionnelles. Comment, alors, distinguer les blessures ordinaires des signes de maltraitance ? Certains signes peuvent vous alerter. Parmi ceux indiquant qu’un enfant peut être victime de négligence, on peut citer le manque d’hygiène, les blessures et maladies fréquentes, la faim ou la fatigue constantes, la malnutrition, des retards de développement, le fait que le parent ou la personne qui s’occupe de l’enfant semble stressé(e), etc. Parmi les signes indiquant des violences physiques, figurent les lésions buccales telles que des brûlures, les ecchymoses ou les coupures des lèvres, la peau déchirée ou meurtrie à l’endroit où la lèvre supérieure rejoint la bouche, les incisives fracturées, des blessures à des stades de cicatrisation différents, des marques d’objets, une explication incohérente de la façon dont la blessure s’est produite, etc. De manière générale, il est essentiel d’observer attentivement l’enfant à chaque nouvelle consultation, afin de déceler tout changement dans son comportement.

Mettre à jour sa formation  

Depuis 2023, le FFCD, organisme de formation du SFCD accrédité DPC, propose la formation « Repérage et conduite à tenir face aux violences et suspicions de violences faites aux enfants au cabinet dentaire ». Il s’agit actuellement de la seule formation dédiée à ces questions et spécifique au secteur dentaire.

 

Identifier les situations nécessitant un signalement

Dr Marion Lagunes

Marion Lagunes, chirurgien-dentiste à Ustaritz et membre du SFCD.

En 2023, le Dr Marion Lagunes a mis en place la formation ” Repérage et conduite à tenir face aux violences et suspicions de violences faites aux enfants au cabinet dentaire “, spécialement conçue pour les chirurgiens-dentistes et leurs équipes.

Que viennent chercher les praticiens qui suivent cette formation ?

Leur principale préoccupation est de savoir à qui s’adresser. Par exemple, aucun participant ne connaissait la CRIP (Cellule de recueil des informations préoccupantes). Ils étaient familiers avec le 119, ” Allô enfance en danger “, mais ne disposaient pas de réseau local au niveau du département pour savoir quoi faire en cas de suspicion de maltraitance. Ils s’étaient déjà posé la question mais n’avaientpas su comment réagir.

En quoi la formation a-t-elle modifié leur approche ?

Elle leur a apporté des connaissances concrètes sur les démarches à entreprendre en cas de suspicion sérieuse de maltraitance, ainsi que sur les personnes à contacter. Ils ont appris à identifier les situations nécessitant un signalement au procureur et comment faire ce signalement. Ils découvrent également la CRIP, et qu’ils peuvent dans un premier temps la contacter par téléphone, avant de déclencher une information préoccupante, si nécessaire.

Quel rôle peut jouer le chirurgien-dentiste ?

Les chiffres sont éloquents : sur une classe de trente, trois enfants sont touchés par l’inceste. En omnipratique, nous avons donc un rôle de santé publique à jouer, notamment lors des dépistages bucco-dentaires. En prenant en charge efficacement ces enfants victimes de violences, on peut éviter la perpétuation de ces schémas et atténuer les conséquences à long terme sur leur santé. Pourtant, bien que la formation sur les violences faites aux femmes soit devenue obligatoire en 2014, aucun dispositif similaire n’a été instauré pour les violences faites aux enfants. Mais cela relève du domaine politique…