Bientôt un nouveau matériau créé à base de dents de mollusque ?
Des chercheurs allemands ont découvert de la santabarbaraite dans les dents du mollusque Cryptochiton stelleri. Ce minéral n'avait encore jamais été trouvé chez une créature vivante.
Une première mondiale. Récemment, des chercheurs ont découvert de la santabarbaraite, un minéral rare à base de fer, dans les dents du mollusque Cryptochiton stelleri, plus connu sous le nom de “pain de viande errant”. On n’avait encore jamais rien trouvé de la sorte chez un organisme vivant. À terme, les résultats de cette étude parus dans la célèbre revue PNAS pourraient aider à concevoir de nouveaux types de matériaux.
Dans leur étude, Linus Stegbauer et son équipe de l’Université de Stuttgart (Allemagne) ont étudié les dents de Cryptochiton stelleri. Ces dernières, que l’animal utilise pour racler les algues des roches, sont recouvertes de magnétite (espèce minérale composée d’oxyde de fer) et sont réputées pour leur dureté. Pour analyser ces redoutables crocs, les chercheurs se sont servi de techniques de spectroscopie. Celles-ci ont été mises au point pour aider les scientifiques à appréhender les propriétés chimiques et physiques d’un matériau en observant comment il interagit avec la lumière et autres types de rayonnements électromagnétiques.
Des dents solides et légères
C’est comme cela que les chercheurs ont découvert que les stylets (les longs tubes creux dans lequel sont ancrées les dents) de ces mollusques contenaient de minuscules particules d’un minéral à base de fer, dans une matrice plus douce composée de chitine. En réalisant d’autres analyses, ils ont pu identifier que les particules étaient de la santabarbaraite.
Il s’agit d’un minéral très dur, contenant moins de fer et plus d’eau que la magnétite. D’après les chercheurs, ce matériau, que l’on n’avait encore jamais observé chez aucune créature vivante, pourrait permettre au mollusque de développer des dents solides et légères, en réduisant au passage sa dépendance au fer.
Impression 3D de composites ultra-durs
Autre observation intéressante : les particules de santabarbaraite étaient plus concentrées vers le haut, et plus clairsemées en bas. Pour prouver que cette découverte pourrait aider à mettre au point de nouveaux types de matériaux, les scientifiques ont créé une encre en mélangeant des ions de fer et de phosphate à un biopolymère dérivé des dents du mollusque. Résultat de l’expérience : l’encre imprimait des matériaux ultra-durs, rigides et durables.
“L’utilisation de phosphates ferriques à faible teneur en fer et à forte teneur en eau peut constituer un stratagème pour créer des composites solides à faible densité. En effet, nous montrons que des encres bio inspirées à base de chitosan et de précurseurs minéraux permettent l’impression tridimensionnelle de composites accordables renforcés par des nanoparticules amorphes précipitées in situ”, concluent les auteurs du papier.
Quid du Cryptochiton stelleri ?
Cryptochiton stelleri est le plus grand des polyplacophores ou chitons. Il s’agit d’une classe de mollusques brouteurs. Sa taille peut atteindre les 36 cm de longueur pour un poids de deux kilos. On le surnomme “pain de viande errant” à cause de son corps brun rougeâtre ovale et bombé. L’animal se nourrit en balayant sa langue flexible sur une roche recouverte d’algues. Vous pourrez apercevoir sa silhouette disgracieuse près des côtes du Pacifique nord, de la Californie au Japon en passant par l’Alaska.