Dr Xavier Struillou : « L'ennui n'a pas sa place à l'ADF ! »
Le directeur scientifique du congrès a élaboré un programme riche et varié, privilégiant l'interactivité avec les conférenciers.
Dentoscope : Comment avez-vous construit le programme de l’ADF 2022 ?
Dr Xavier Struillou : Je l’ai construit avec toute l’équipe du comité scientifique. Le choix des experts scientifiques est le fruit de discussions avec le comité de pilotage et les secrétaires généraux de l’ADF. Le comité scientifique, constitué de praticiens installés dans toutes les régions de France, a été établi sur une parité : autant d’universitaires que de libéraux, de femmes que d’hommes et le programme scientifique a respecté le même principe.
Je siège au conseil d’administration de l’ADF depuis quinze ans et cela fait trente ans que je participe au congrès. L’ADF est un congrès d’omnipratique, aussi l’équilibre entre libéraux et universitaires me semble impératif afin d’avoir à la fois le recul scientifique et l’expérience du cabinet. La parité homme-femme est naturelle : c’est le reflet de l’évolution de la démographie professionnelle. Il y a plus d’étudiantes que d’étudiants en études d’odontologie aujourd’hui.
Une séance, proposée le premier jour du congrès, porte sur l’avenir de l’exercice libéral. Comment le voyez-vous, en France ? Quelles évolutions et tendances apparaissent ?
Le praticien dans son petit cabinet est en voie de disparition. Tout d’abord parce qu’un cabinet nécessite des investissements importants. C’est aussi l’aspiration des jeunes générations de travailler dans un exercice non solitaire. La tendance que nous observons est la mini-clinique ou le cabinet médical composé de plusieurs praticiens afin tout d’abord de se répartir les jours de présence, développer sa vie personnelle, mais aussi pour ne pas exercer seul.
C’est le reflet des changements de la société elle-même que l’on observe aussi chez les médecins. La jeune génération n’est plus prête à travailler 70 heures par semaine. Elle préfère donc se regrouper pour gagner en qualité de vie. Les chirurgiens-dentistes ne font pas exception à cette tendance.
Lors d’une « séance phare », dont vous êtes le responsable scientifique, quatre praticiens vont présenter des cas cliniques pluridisciplinaires montrant la transversalité nécessaire pour traiter les patients. Quel sera son déroulement ?
L’idée est de proposer une séance un peu originale, qui sera scientifique mais au travers d’une approche non conventionnelle. Les présentations scientifiques ne seront pas amenées d’une façon habituelle mais plutôt sur un mode théâtralisé. Je ne peux pas dévoiler toutes les surprises, mais ce sera original… C’est un format que l’on n’a jamais fait, avec quatre conférenciers de très haut vol. Il y aura une certaine alchimie car ce sont des amis qui aiment travailler ensemble.
La pluridisciplinarité c’est une dimension importante de l’exercice ?
La pluridisciplinarité est un synonyme de l’omnipratique. Un omnipraticien fait tout, dans les limites de ses connaissances et de ses capacités. Il juge par sa conscience professionnelle et son sens de l’éthique où sont ses limites. C’est un touche-à-tout, il fait de la pédodontie, comme il fait de la parodontie, de la chirurgie, peut-être un peu d’implantologie et de l’orthodontie selon ses aspirations.
Les séances pluridisciplinaires sont d’un intérêt particulier car elles permettent de faire un point exhaustif. J’ai demandé aux experts du comité scientifiques de travailler pour mettre en place des conférences autour de deux ou trois disciplines afin de proposer des séances décloisonnées.
Les grands débats sont repris cette année. Quel est l’intérêt de ce format pour le public de praticiens ?
L’intérêt pour le public est l’accessibilité aux conférenciers et la mise en scène. Le praticien se trouve dans un studio, le public étant placé sur les quatre côtés de la salle, un peu comme sur un ring. Le conférencier présente des cas courts qui correspondent aux différentes situations cliniques du thème abordé. Une relation directe s’instaure entre le conférencier et le public, sans barrière physique.
Cette séance qui se rapproche d’une discussion est un format que l’on rencontre assez rarement dans un congrès. Le conférencier revient sur les cas en fonction des questions posées par l’auditoire. Le public est vraiment partie prenante et l’aspect interactif de ce format est très marqué. C’est un concept que personnellement j’apprécie beaucoup.
Quel message souhaitez-vous adresser aux praticiens qui se rendront à l’ADF ?
On vient à l’ADF pour voir des amis et se retrouver entre praticiens car c’est le congrès annuel du monde dentaire français. Il faut profiter de ce plaisir de revoir ses camarades de promotion, ses confrères et amis. L’ADF propose un programme accessible et le mot d’ordre est de profiter de façon joyeuse de cet événement scientifique. Si on n’en profite pas, c’est ennuyeux. Or l’ennui n’a pas sa place à l’ADF ! J’ai souhaité que les conférenciers soient particulièrement accessibles également, animés de l’envie de transmettre.
On peut se construire un programme à la carte avec un grand choix de séances. On a réduit le nombre de grandes séances magistrales de trois heures, transformées en deux séances plus courtes d’une heure et une heure et demie. Il y a donc encore plus de séances qu’avant et c’est une tendance qui va se renforcer l’année prochaine. La majorité des conférences sont des formats courts. Il y a aussi des parcours fléchés, c’est-à-dire thématiques, par exemple : la dent immature, le sinus. Selon les jours, le praticien peut participer à un TP, une conférence magistrale, une séance « point de vue » ou « essentiel », ou une démonstration télévisée en direct. Un thème est exploré, au travers de différents formats et pendant plusieurs jours, ce qui permet au visiteur d’aborder différents thèmes dans la même journée. Notre objectif est la satisfaction du public en apprenant d’une manière accessible, concrète et qui ne soit pas ennuyeuse.