Les dentistes en première ligne pour alerter sur les violences familiales
Les personnes qui consultent un dentiste pour des blessures à la bouche ont peut-être été victimes de violences conjugales.
Une étude américaine publiée le 11 avril dans le Journal of Aggression Maltreatment and Trauma rapporte que près de 75 % des traumatismes crâniens et cervicaux associés à des violences domestiques surviennent à la suite d’une blessure buccale.
L’auteur principal de l’article, Timothy Ellis, étudiant en médecine dentaire à la Midwestern University (Arizona, Etats-Unis), met en évidence le rôle important que les dentistes peuvent jouer dans l’identification et le signalement des victimes, « C’est l’occasion pour les dentistes d’être des détecteurs précoces qui peuvent orienter ces personnes vers des soins de suivi ».
Les biomarqueurs oraux qui doivent alerter comprennent les déchirures, les fractures de la mâchoire et des dents. Les signes évidents de violence pouvant indiquer une lésion cérébrale sont les traumatismes aux nerfs de la bouche et de la mâchoire, ainsi que les lésions de l’os nasal. La décoloration des dents, les racines émoussées et la nécrose pulpaire, peuvent également être des signes d’un traumatisme dentaire antérieur justifiant un examen plus approfondi.
Selon la publication, les dentistes sont insuffisamment formés à la détection des potentiels cas de violences familiales. Ils sont pourtant en première ligne.« J’ai discuté de ce sujet avec plusieurs dentistes » a déclaré Ellis, « beaucoup trouvent le sujet intéressant, mais reconnaissent avoir peu d’expérience en la matière. Le plus souvent ils pensent que de tels cas seraient susceptibles de se présenter en centre dentaire et non dans leurs interactions quotidiennes avec les patients ». Il ajoute qu’il est« intéressant de noter qu’il existe des protocoles très stricts en dentisterie pédiatrique, mais qu’une grande lacune subsiste en ce qui concerne les adolescents, les jeunes adultes et les adultes en général ».
Le rôle d’alerte que peuvent jouer les dentistes du fait de leur position privilégiée a plusieurs fois été évoquée en France. L’ONCD s’est saisi de la question dès 2016 en mettant en place des référents violences faites à autrui dans chaque département.
Une formation aux violences familiales et conjugales a, par la suite, été mise en place en mars 2018 à l’initiative du syndicat des femmes chirurgiens-dentistes des Hautes-Pyrénées. Au niveau municipal, la ville de Rouen forme également les professionnels du dentaire à identifier les victimes et à les orienter vers des soins adaptés. L’ONCD, quant à lui, vient de mettre en ligne une formation e-learning destinée à mieux repérer, prendre en charge et orienter les patientes victimes de violences. La formation, d’une durée totale de deux heures, peut être interrompue à la fin de chaque module pour être reprise ultérieurement.
Restoring More than Smiles in Broken Homes: Dental and Oral Biomarkers of Brain Injury in Domestic Violence – Timothy W. Ellis et al. – Journal of Aggression, Maltreatment & Trauma
https://bit.ly/2Lx6qHW
F.G