bannière suresmile 990 x 122 px

Et si nos dents venaient d'écailles de poisson préhistorique ?

Selon une nouvelle étude réalisée sur un fossile de poisson-scie éteint, les dents auraient évolué à partir d'écailles externes de l'animal.

Par la rédaction, publié le 07 septembre 2022

Et si nos dents venaient d’écailles de poisson préhistorique ?

À l’heure actuelle, deux théories s’affrontent pour retracer l’origine des dents. Certains scientifiques affirment qu’elles auraient évolué à partir d’écailles externes, d’autres au contraire qu’elles se seraient développées de l’intérieur de la bouche vers l’extérieur. Aujourd’hui, une nouvelle étude parue dans le Journal of Anatomy, soutient la première. Les scientifiques étudient un fossile de l’espèce Ischyrhiza mira, un poisson-scie éteint qui vivait en Amérique du Nord il y a environ 65 à 100 millions d’années. L’espèce a été anéantie par l’astéroïde ayant décimé les dinosaures.

Tout comme les requins-scies et les poissons-scies qui arpentent nos océans aujourd’hui, la créature avait des pointes dentelées autour du museau, appelées denticules rostraux, pour repousser les prédateurs et attraper de la nourriture. Travaillant sur le lien entre denticules rostraux et écailles, les chercheurs ont analysé la couche externe dure et émaillée des pointes du museau. Pour examiner la microstructure interne des denticules rostrales fossiles, ils ont tranché les échantillons en largeur et en longueur. Après quoi, ils ont utilisé un microscope électronique à balayage pour étudier l’anatomie microscopique.

« Étonnamment, l’émaloïde (couche extérieure) du denticule rostral de I. mira était tout sauf simple, explique le paléontologue des vertébrés Todd Cook de l’université d’État de Pennsylvanie (États-Unis). Elle était considérablement plus complexe que l’émaloïde des écailles du corps. En fait, l’organisation globale de l’émaloïde de cet ancien poisson-scie ressemblait à celle de l’émaloïde des dents des requins modernes, qui a été bien caractérisée. »

 

Une résistance aux forces mécaniques

 

L’émail du fossile correspond à l’émail des dents de requins modernes puisqu’il est constitué de paquets groupés de microcristaux de fluorapatite. Ces derniers sont disposés en lignes nettes près de la surface de la dent, mais de façon plus aléatoire en bas.

Ces couches sont traversées par des microcristaux emballés, placés perpendiculairement à la surface de la dent. Ces différentes orientations donnent aux dents de requin leur solidité et leur résistance. Il semblerait qu’il en soit de même pour Ischyrhiza mira. « Il est probable que la disposition en faisceau des microcristaux de l’émail des denticules rostraux d’I. mira a également servi à résister aux forces mécaniques », détaille Todd Cook.

Si les écailles et les dents ont pu évoluer séparément pour former leurs microstructures en faisceaux, il parait plus logique que l’une soit apparue après l’autre, ce qui validerait donc l’hypothèse de l’extérieur vers l’intérieur. « Il est plus parcimonieux de suggérer que les écailles ont produit une microstructure groupée similaire dans les dents et les denticules rostrales que de conclure que ces deux structures ont évolué en un émaloïde similaire indépendamment », avance Cook.

 

Un heureux hasard

 

« Cette découverte fournit des preuves directes à l’appui de l’hypothèse de l’extérieur vers l’intérieur, car elle montre que les écailles ont la capacité de développer un émail complexe ressemblant à une dent à l’extérieur de la bouche », se félicite Todd Cook auprès de Science Alert.

Pour la petite histoire, les chercheurs n’avaient pas prévu d’étudier l’évolution des dents en s’intéressant aux denticules rostraux. Malgré tout, ces résultats pourraient avoir un impact important sur les prochaines études sur ce sujet.

À l’époque, Ischyrhiza mira pouvait mesurer jusqu’à 2,5 mètres de long. Des restes de l’espèce ont été trouvés dans le monde entier. Ici, les spécimens ayant été précédemment récupérés dans une formation rocheuse du New Jersey, sur la côte Est des Etats-Unis.

À l’heure actuelle, les requins-scies ou Pristiophoriformes forment un ordre de poissons cartilagineux  qui appartiennent au super-ordre des requins. Leur corps est mince, légèrement aplati, et de petite taille (moins de deux mètres). Comme tous les requins, ils possèdent des branchies latérales. Mais ce qui leur confère leur apparence si particulière est leur long rostre denté muni de deux longs barbillons. À ne pas confondre avec les poissons-scies, des raies qui mesurent six à sept mètres, possèdent des fentes branchiales et un rostre dépourvu de barbillons. Ils appartiennent à l’ordre des Pristiformes.