Accord d’intéressement : quels intérêts pour le salarié et l’employeur ?
Mécanisme d’intéressement salarial bénéficiant de larges exonérations, l’accord d’intéressement semble, sur le papier, être un merveilleux outil de gestion du personnel. Qu’en est-il réellement ?
La loi définit l »accord d’intéressement comme un mécanisme facultatif ayant pour objet d’associer collectivement les salariés aux résultats ou aux performances de l’entreprise.
Il résulte d’un accord au sein du cabinet entre l’employeur et les salariés (ou leur représentant) et consiste en un versement aux salariés bénéficiaires de sommes d’argent : les primes d’intéressement.
Cet accord doit notamment prévoir la durée de l’accord, les modalités de calcul et les dates de versements. A ne pas confondre avec le régime de participation aux résultats de l’entreprise, obligatoire pour les entreprises de plus de 50 salariés.
Le régime juridique des accords d’intéressement
• Les modalités de conclusion
L’accord est conclu pour une durée de trois ans et doit être déposé auprès de la Direccte accompagné d’une série de pièces variant en fonction de chaque situation. L’administration dispose d’un délai de quatre mois, à compter de ce dépôt, pour demander le retrait ou la modification des dispositions contraires aux dispositions légales.
Une date limite de conclusion encadre également le bénéfice des exonérations ci-après mentionnées.
• Les entreprises concernées
Le dispositif est ouvert à toute entreprise (cabinet individuel ou SELARL) employant d’un à 50 salariés et à jour de ses obligations en matière de représentation du personnel. À noter : un tel mécanisme sera difficilement applicable au sein d’une SCM dans la mesure où il sera impossible de déterminer les résultats au niveau de l’entreprise, les honoraires et donc le chiffre d’affaires étant localisés auprès de ses associés et non au niveau de la SCM elle-même. Un accord d’intéressement basé sur l’amélioration des performances au sein de la SCM sera envisageable mais son intérêt reste à examiner
.• Les bénéficiaires
Le mécanisme est facultatif mais s’il est mis en place, il devra concerner tous les salariés. Il s’agit en effet d’un outil d’intéressement collectif et non individuel. Une durée minimum d’ancienneté de trois mois peut cependant être exigée. Sous cette réserve, tous les salariés du cabinet en seront bénéficiaires quand bien même leurs performances individuelles ne seraient pas satisfaisantes. Peut également en être bénéficiaire le conjoint du chef d’entreprise s’il a le statut de conjoint collaborateur ou de conjoint associé.
• Le calcul de l’intéressement
Les modalités de calcul de l’intéressement sont librement fixées au sein de l’accord mais doivent présenter un caractère aléatoire et résulter d’une formule de calcul liée aux résultats ou aux performances du cabinet. En outre, à la fin de chaque exercice, le praticien peut décider de verser un supplément d’intéressement pour tous les bénéficiaires, sous réserve de respecter les plafonds ci-après mentionnés. La répartition de l’intéressement entre les salariés peut être uniforme, proportionnelle à la durée de présence au cabinet ou être une combinaison de ces critères.
• Les plafonds
Le montant de l’intéressement ne doit pas dépasser 20 % du total des salaires annuels bruts versés aux salariés bénéficiaires. En outre, pour une même personne, le montant de la prime ne peut excéder la moitié du plafond annuel de la Sécurité sociale, soit 19 614 € pour l’année 2017.
• L’information du personnel
L’accord d’intéressement doit prévoir un système d’information du personnel et de vérification des modalités d’exécution de l’accord. Le salarié est informé individuellement de ses droits d’une part par la remise d’une note d’information sur l’accord d’intéressement et d’autre part, lors de l’attribution de chaque prime, d’une fiche distincte du bulletin de paie. Cette fiche mentionne notamment le montant global de l’intéressement et le montant des droits attribués à l’intéressé.
• Les modalités de versement
Le versement de la prime doit être effectué avant le premier jour du sixième mois suivant la clôture de l’exercice social, soit au 31 mai de chaque année pour une clôture au 31 décembre. Au choix du salarié formulé dans les 15 jours suivant la réception de la fiche ci-avant mentionnée, le versement peut être immédiat entre ses mains ou affecté au plan d’épargne d’entreprise et ainsi bénéficier d’une exonération d’impôt sur le revenu pour le salarié.
• La règle de non assimilation au salaire
La loi précise bien que les primes d’intéressement n’ont pas le caractère de salaire pour l’application de la législation du travail. Cela signifie qu’elles ne peuvent en aucun cas se substituer à une rémunération. Le praticien est donc tenu de respecter les minimums salariaux en vigueur dans la convention collective des cabinets dentaires et ne pourra qu’en supplément verser un intéressement.
Ce point est scrupuleusement vérifié lors de contrôle URSSAF qui requalifiera ces sommes en salaires soumises à cotisations sociales.
Le régime social et fiscal des accords d’intéressement
• Le traitement social et fiscal pour le salarié
Ces sommes n’étant pas assimilées à du salaire elles ne sont pas soumises à cotisations sociales. Cependant, l’intéressement sera soumis aux prélèvements suivants :
- Prélèvements sociaux (CSG et CRDS) dans la catégorie des revenus d’activité, soit au taux de 7,5 %. Étant toutefois précisé que la CSG sera déductible de l’impôt sur le revenu au taux de 5,1 %.
- Si l’entreprise y est soumise, à la taxe sur les salaires.
- Au forfait social au taux de 20 %.
Pendant les six premières années de conclusion de l’accord d’intéressement, un taux réduit de 8 % sera applicable. En revanche, les primes versées au salarié seront imposées à l’impôt sur le revenu, au même titre que les salaires sauf en cas d’affectation un plan d’épargne salariale.
• Le traitement fiscal pour l’entreprise
Assez logiquement, les primes d’intéressement sont déductibles des résultats, tant pour les sociétés à l’IS que pour les professionnels en BNC. Pour rappel, s’agissant des accords conclus avant le 31 décembre 2014, ils peuvent donner lieu à crédit d’impôt sur les bénéfices.
En résumé
À la question : « l’intéressement salarial est-il intéressant ? », la réponse est incontestablement : oui.
Comme cela a été exposé ci-avant, cet outil permet aux chirurgiens-dentistes d’intéresser leur(s) salarié(s) aux résultats du cabinet tout en bénéficiant d’un régime social et fiscal réellement avantageux.
Lorsque l’on connaît le coût d’une augmentation de salaire, on comprend aisément l’intérêt de ce système. Par ailleurs, en cas de mauvais résultat du cabinet, aucun intéressement ne sera dû ! En revanche, à la question : « ce système doit-il devenir la norme ? », la réponse est non. Ce type d’outil présente en effet divers inconvénients :
- Il suppose une réelle implication du praticien et une certaine lourdeur dans la gestion qui ne convient pas à tout le monde.
- Le recours à un professionnel qualifié pour la mise en place d’un tel accord implique nécessairement des coûts.
- Le calcul de l’intéressement, basé sur les résultats du cabinet, pourrait venir limiter l’intérêt pour un praticien en SELARL de « faire du bénéfice » sur un exercice et donc limiter la ventilation de sa rémunération entre dividende et rémunération de gérant.
- En outre, les primes d’intéressement seront dues quand bien même vous n’êtes pas satisfait
de vos salariés ou n’avez pas la trésorerie disponible. Pire, en cas de retard de paiement, vous serez tenu au paiement d’intérêt de retard égal à 1,33 fois le taux moyen de rendement des obligations des sociétés privées publié par le ministre de l’Économie.
L’accord d’intéressement est donc sans nul doute un outil d’optimisation du coût social mais doit être longuement réfléchi avant d’être mis en place.