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Je crée mon cabinet : la 1ère installation en 3 actes

La création du cabinet, souvent la première installation du praticien, est une aventure à classer dans les expériences rares de l’existence. Parce qu’il faut choisir la bonne direction dès le départ du projet, Orthophile s’est tourné vers l’architecture d’intérieur pour découvrir les phases incontournables de cette étape professionnelle. A écueils identifiés, erreurs évitées…

Par la rédaction, publié le 29 mai 2013

Je crée mon cabinet : la 1ère installation en 3 actes

L’architecte d’intérieur Clément Harel a fondé WAT architecture & dentaire, basé à Nantes, qu’il a dédié au secteur du dentaire. Cette année à Montrouge, il a participé à l’accompagnement des jeunes praticiens sur le point de démarrer leur exercice en cabinet au moment si déterminant de la première installation.

« Le but est de guider pour éviter les erreurs et de conseiller quand la création du cabinet n’a pas encore été expérimentée, et pour cause… Cette mise en œuvre doit être organisée dans une conception en étapes calées sur l’intervention de différents professionnels : les banquiers, les notaires et les agents immobiliers au moment de l’achat, les architectes, maîtres d’œuvre et les concepteurs pour faire éclore le projet qui est concrétisé et verrouillé par les installateurs et équipementiers. »

Quand un jeune praticien sait précisément avec quel fauteuil il veut démarrer son activité, il n’a pas forcément réfléchit à l’organisation de son exercice avant de créer son cabinet : « La toute première chose à faire est d’analyser sa méthode de travail : le praticien va-t-il être à son aise avec un unit transthoracique, un kart roulant, un meuble arrière latéral ou au contraire un espace vierge de matériel derrière la têtière ? Est-il gaucher ou droitier… car c’est important pour l’ergonomie et la gestion de l’espace. Les espaces de soins seront-ils de préférence fermés ou bien ouverts ? »

Passons en revue les trois étapes phares de la première installation du cabinet en sachant, d’une part, qu’un projet bien pensé en amont se matérialisera toujours mieux et, d’autre part, qu’en dehors de nos goûts pour une personnalisation du cabinet, l’organisation de notre espace de travail doit toujours prendre pour point d’origine … la bouche du patient.

Acte 1 – Un local (un terrain) aussi compliqué à trouver qu’un financement

Trouver le local qui se prête à l’exercice dentaire est la première épreuve à passer pour créer son cabinet. Les normes ERP (établissement recevant du public) qui balisent les conditions d’accueil des personnes (accessibilité et sécurité incendie) rendent l’opération d’achat délicate. « Globalement, c’est l’accès du cabinet qui va permettre au praticien de faire son choix : un local en étage sans ascenseur doit être relégué sans ressentir le début d’un sentiment de regret. Il est donc possible d’imaginer installer son cabinet en centre d’affaires dans un immeuble de plusieurs étages avec ascenseur où les conditions lumineuses seront toujours assurées. Mais alors, il faut veiller aux arrivées d’eau et aux systèmes de vidange qu’un orthodontiste, au contraire d’un entrepreneur lambda, doit se garantir. »

Le praticien en phase de créer son cabinet aurait aussi bien raison d’étudier la concurrence environnante : « Je conseille mes clients de s’adresser aux dépôts dentaires où l’activité est connue, comme radiographiée. Des départs à la retraite dans la circonférence du cabinet ? Beaucoup de jeunes praticiens sont-ils installés ? Le financement se construira appuyé d’un business plan à monter avec l’aide de son expert-comptable. En fait, il faut penser à la revente du cabinet quand on n’a même pas songé à l’inaugurer ! » Même si cela paraît aussi incongru que de songer à la retraite au démarrage de son activité professionnelle. Cette réserve permet d’écarter les projets valables uniquement dans notre tête, irréalistes si on veut bien s’y pencher en toute honnêteté. Il est bon parfois de s’autoriser exigences et vertes critiques… oui, c’est le moment de faire preuve d’un mauvais esprit.

ACTE 2 – Créer son cabinet et le zonage de l’activité

« Un plan d’architecte (fichier informatique) me permet de travailler au plus précis pour établir un état des lieux du projet (espace disponible, position et dimensionnement des ouvertures extérieures, gaines techniques… Mais aussi arrêt coup de poing et raccordement électrique au tableau et câblage informatique). Avec cela peuvent arriver un certain nombre de difficultés à résoudre selon les contextes précis de chaque cas individuel comme : peut-on faire passer des tuyaux dans les sous-sols si la percée des dalles est impossible ? Faut-il penser une estrade pour le passage de ces fluides ? Se posera alors l’accès du cabinet aux PMR car un niveau devra être franchi, éventuellement à l’aide d’une rampe à faible pente, explique Clément Harel. De la mise en œuvre du cahier des charges du praticien découle l’organisation des espaces avec la répartition des zonages des salles et la circulation dans la surface, la part la plus créative de conception. » Point de départ : le nu.

Il doit intégrer des blocs majeurs du cabinet : salle(s) de soins, l’importante stérilisation et le pôle entrée-accueil. Ensuite, les sanitaires, la salle d’attente, le local technique, le bureau, la salle de repos en fonction de la composition de l’équipe, la cuisine et son incontournable aération pour éviter que les odeurs incompatibles à l’exercice ne se propagent dans le cabinet. « Il est primordial de rationnaliser l’espace pour optimiser le travail. Il peut s’agir de vouloir réduire les déplacements des assistants en concevant une stérilisation centrale. À la 1re installation, l’assistanat du praticien est souvent à la charge d’un seul premier salarié dont la présence est tout autant nécessaire en salle de soins, à la stérilisation et à l’accueil dont on peut penser qu’il sera son point central. » Architecte et concepteur enchaînent les passes pour préciser chacun à leur tour le projet de normes d’urbanisme en données techniques dentaires : plus les éléments sont précis, plus l’arrivée de l’équipement est fluide.

ACTE 3 – L’aménagement intérieur : facile s’il a été figé dès le départ

Si, et seulement si, les données techniques fournies ont suffisamment été précisées, alors l’aménagement et l’arrivée de l’équipement peut être fluide. Cela veut dire que l’architecte a dû être en possession 1- de la liste des équipements implantés 2- des points techniques. Si l’arrivée par des installateurs et des équipementiers a été prévue, cette seconde mission sera alors facilement emportée : la bonne prise au bon endroit, l’arrivée d’eau, la vidange… la colonne du fauteuil et ses multiples branchements, le scialytique plafonnier ou sur l’unit…

« Tous ces équipements sont indispensables au travail du praticien mais les variantes proposées par les fabricants imposent une réflexion sur la méthode de travail. Si le praticien n’a pas su faire ses choix plus tôt, je propose de la configuration standard pour simplifier la mise en œuvre. Les modifications seront toujours compliquées et représenteront même avec la meilleure volonté une plus-value qui pèsera lourdement sur le budget. » Le praticien qui s’installe est désormais averti avant de créer son cabinet : les modifications viennent toujours de l’incertitude… plus le projet est défini dès le début, mieux le projet pourra s’élever. 


Espace & minimum vital

Avec une sté, un accueil et une salle d’attente, un praticien qui créé son cabinet avec une salle de soins unique doit idéalement viser une surface de 50 à 70 m2, pas en dessous. Pour deux salles, le cabinet comprendra un minimum de 80 m2. Pour 3, de 80 à 110 m2 et ainsi de suite. Pour délimiter la surface désirée, le praticien doit également savoir s’il souhaite que son cabinet intègre un labo, une salle de repos, des bureaux… « Les modifications d’une surface existante représentent toujours un surcoût, il faut choisir en toute connaissance de cause », alerte Clément Harel.

Le cahier des charges du praticien pour créer son cabinet

Le cahier des charges va permettre de coucher sur le plan les points qui définissent le cabinet. Ce cahier des charges s’entend d’abord par le nombre de salles de soins. Puis, le nombre de personnes présentent à l’accueil, la capacité de réception de la salle d’attente, la position de la salle de stérilisation, la radio (dans la norme, 3 m2 suffisent dans un espace borgne), le bureau – le praticien souhaite-t-il une tablette ou un bureau, dans la salle de soins ou bien séparé, vraiment séparé ou qui communique avec la salle de soins ? –, les toilettes – un WC réservé aux personnes à mobilité réduite + le praticien doit aussi être en mesure de dire s’il souhaite avoir des toilettes personnelles –, le cabinet comprendra-t-il une salle de repos avec des vestiaires séparés pour les femmes et les hommes ? Des casiers individuels fermés ou un placard unique et commun ?

Le praticien doit imaginer l’accueil de la patiente dans un bureau administratif clos et le plus souvent proche de l’accueil même du cabinet. La capacité de stockage est aussi importante avec l’ensemble des rangements mais pas uniquement car, selon la surface, un local dédié permet réellement d’optimiser l’organisation de l’exercice – encore faut-il en disposer.

La stérilisation

Le principe de la mise en place de la stérilisation respecte le plus souvent une règle simple : son implantation dans l’espace doit la situer à 5 mètres de distance (le maximum) de la salle de soins – la raison pour laquelle la stérilisation est actuellement toujours centrale, c’est la mode. « Cette règle est facile à respecter quand le cabinet comprend jusqu’à 4 salles ; au-delà, il est plus délicat de faire un choix équitable, dit Clément Harel. Mais la salle de stérilisation est un élément qui se prête volontiers à l’évolution : le praticien peut partir d’une sté unique (jusqu’à 4 salles, N.D.L.R.) et prévoir ensuite, dans le cadre d’une extension avec ajout de salles de soins, de compléter la chaîne de stérilisation par un autre espace de décontamination, séparé et proche des ces nouvelles salles. » Il suffit alors simplement de trouver les m2 nécessaires et la modification ne sera pas trop onéreuse.


Notre expert – Clément Harel – WAT architecture & dentaire à Nantes

Architecte d’intérieur, il a dédié son cabinet à l’univers dentaire. Clément Harel intervient sur toute la France sur des surfaces de 30 à 400 m2. Notre expert gère tous les plans de conception (mais pas les suivis de chantier, la part de l’architecte) en partant des surfaces nues, organise les espaces intérieurs, réalise les dossiers techniques en connaissant les exigences du secteur ; WAT propose aussi des modélisations en 3D. « Quand le praticien n’a pas encore acheté, je visite pour donner mon avis et je peux me permettre de conseiller de ne pas signer un compromis si les conditions ne me semblent pas réunies. »

La personnalisation du cabinet

Créer son cabinet, le personnaliser, c’est lui donner des caractéristiques qui vont l’individualiser parmi les autres. « La première chose que le patient connaît du cabinet, c’est son accueil et la qualité de son attente, explique Alexandra Keepfer, designer d’intérieur Arseus Dental. Il y a là un pôle si important qu’il est juste de concevoir cette entrée comme la vitrine du cabinet. » Pour serrer le budget de démarrage, la designer propose de plus en plus des banques d’accueil si modulables et personnalisables qu’elles deviennent des pièces uniques, mais fabriquées en usine à un prix divisé par 2 voire 3. « Avec des formes rondes, on adoucit l’ambiance, avec la couleur, on parle aussi de soi… Une atmosphère d’esthétique globale influence le comportement de la patientèle.

 Pour rassurer et donner confiance, je conseille les tonalités qui réduisent le stress – le taupe éloigne du clinique – et de dynamiser l’effet par des touches de couleurs plus audacieuses. Par exemple, par la mise en couleur de certaines surfaces pour matérialiser un cheminement dans le cabinet ou par des objets qui apporteront du peps. Évitons donc un mur rouge trop agressif et réservons cette couleur qui symbolise la vitalité aux détails qui animeront l’espace. Actuellement, les matériaux évoluent et permettent de respecter les normes (hygiène et sécurité) comme de sortir le cabinet du contexte médical…

Pour moi, la 1re installation se pense avec des matières brutes, naturelles et minérales, qui exigent peu d’entretien, et adopte pour les mêmes raisons le PVC, les peintures lessivables et le papier peint qui fait un retour en force. L’éclairage aussi permet une bien utile mise en scène du cabinet. Et les stickers sont utiles pour communiquer des messages à moindre frais, avec une mise en œuvre simple qui, en plus, ne détériore pas les surfaces…   Une bonne option pour l’installation quand la déco ne peut pas (plus) se tailler la part du lion du budget. »

Alexandra Keepfer
Formation aux Beaux Arts à l’appui, la designer propose des solutions en adéquation avec les attentes du praticien pour créer son cabinet avec, en point fort, une forte compétence en décoration, design et esthétique pour personnaliser les lieux.

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