En finir avec le mal de dos
Contracture, lumbago, sciatique, lombalgie… tous les orthodontistes se plaignent (ou se plaindront) de mal de dos. Entre médecine conventionnelle et solutions alternatives, des techniques ont – vraiment – fait leurs preuves. Enquête sur le mal du siècle.
Les troubles musculo-squelettiques (TMS) pourraient être qualifiés de maladie de la profession dentaire. Selon une dernière étude de l’Académie nationale de chirurgie dentaire, les douleurs lombaires touchent 42,4 % des praticiens, les douleurs cervicales 33,6 % et les dorsales 24 %. Les mauvaises postures créent des tensions issues de la régulation du bon équilibre des chaînes musculaires profondes (posture) et superficielles (mouvement).Tout ce qui ne se trouve pas exactement dans l’axe vertical chevilles-bassin-épaules-tête, crée des tensions et donc un mal de dos.
Lorsque le praticien déplace sa tête (qui pèse environ 4 kg) de quelques centimètres en avant du centre de gravité, une véritable réaction musculaire en chaîne est déclenchée pour retenir ce poids dans le vide. Bien souvent les muscles superficiels saturent en se contractant plus que la normale sans avoir suffisamment de temps pour le relâchement. Et la douleur s’installe, récurrente et handicapante.
Traitement et entretien
Face à une douleur répétitive, la première démarche est de se rendre chez son médecin traitant. La médecine peut guérir de manière satisfaisante, mais pour certains, elle ne fait qu’éliminer (à plus ou moins à long terme) le signal émis par notre corps pour avertir d’un dysfonctionnement grâce à des médicaments. Le Dr Laurent Dillinger, médecin généraliste conseille de mêler les traitements classiques et l’entretien régulier : « Pour le mal de dos aigu d’un orthodontiste, je prescris un traitement en trois étapes : 1. Trois jours de paracétamol, d’anti-inflammatoire et de décontractant musculaire. 2. J’oriente ensuite le praticien vers un kinésithérapeute ou ostéopathe qui va traiter la cause. 3. Je conseille un entretien hebdomadaire qui mêle plaisir et sport. » La mésothérapie représente par exemple un traitement local adapté, sa philosophie : « injecter peu, rarement, au bon endroit ».
Elle consiste en des injections, très superficielles (et peu douloureuses) de médicaments à travers la peau. Ces injections de décontracturants ou anti-inflammatoires peuvent être intra épidermiques, intra dermiques superficielles ou profondes (entre 1 et 13 mm). Ainsi, les doses de médicaments sont réduites, les substances ne passent pas dans le sang et ne touchent pas l’estomac ou le foie. « Cette méthode réduit certes les effets secondaires des médicaments, mais ne traite pas la cause ! précise le docteur Laurent Dillinger. Il faut toujours l’associer à un kinésithérapeute par exemple. »
Soigner la cause : la kinésithérapie
Les séances ont pour objectif de rééduquer les muscles pour supprimer une raideur ou améliorer la mobilité articulaire. Discipline paramédicale, elle est exercée par un praticien diplômé d’État sur ordonnance médicale. « Qu’il s’agisse de rééducation par le mouvement en méthode passive (le kiné masse le patient) ou active (le patient travaille), avec des appareils ou non, le professionnel de santé doit être disponible une demi-heure et seul avec l’ orthodontiste, explique le Dr Dillinger. Une séance par mois corrige le dos dans la régularité pour éviter les crises aiguës. »
Soigner la cause : l’ostéopathie
L’approche du corps est plus globale grâce à une recherche étiologique du problème. En clair, l’ostéopathe va trouver la solution à une pathologie qui peut être éloignée physiquement et temporellement de la douleur en tenant compte des différentes « dimensions » de l’être humain. « Je traite les orthodontistes principalement pour des cervicalgies et des lombalgies dues à une mauvaise position professionnelle. Ces deux zones charnières de la colonne ne sont pas faites pour supporter les torsions, explique Ludovic Gilly, ostéopathe à Meyrargues.
Après une approche du traitement et une remise en place articulaire, je relâche les tensions musculaires pour réinitialiser une certaine normalité au nouveau musculaire. Le problème ne vient pas seulement d’une mauvaise position en cabinet…Le stress palpable est commun à tous les chefs d’entreprise. Il peut être amoindri grâce à un traitement viscéral et/ou crânio-sacré. » Une à trois séances sont conseillées en fonction de la pathologie et du passé traumatique.
Soigner la cause : la chiropraxie
L’activité de chiropracteur a été régulée par la loi Kouchner de mars 2002 (art. 75), en même temps que celle d’ostéopathe, dont le décret d’application a été publié en mars 2007. Elle se rapproche de l’ostéopathie dans son approche du corps et de son fonctionnement. Les chiropracteurs localisent les subluxations* vertébrales qui empêchent le passage de l’influx nerveux et les ajustent pour rétablir un bon fonctionnement musculaire et nerveux. « Je commence par une anamnèse complète et une analyse physique pour comprendre le problème musculo-squelettique. », détaille Pierre Mainguet chiropracteur à Clermont-Ferrand (63).
Une fois trouvés la (ou les) subluxation vertébrale responsable, le chiropracteur va réaliser une série « d’ajustements » vertébraux précis pour libérer le nerf impliqué dans le dysfonctionnement. « Le bas du dos est une structure porteuse de l’ensemble du haut du corps et donc particulièrement sensible. Il est vivement conseillé de consulter dès l’apparition d’une douleur car le mal de dos peut-être très pernicieux. Il est dans l’intérêt du praticien de ne pas se négliger. Cette approche ne masque pas le problème – et donc la douleur – mais cherche à traiter la cause. »
* Il s’agit des perturbations du système locomoteur (os, articulations, ligaments…) qui se localisent, tout particulièrement au niveau du crâne, de la colonne vertébrale ou du bassin.
Soigner la cause : la médecine traditionnelle chinoise
Elle comporte quatre types de soin. L’acupuncture met en œuvre de fines aiguilles pour stimuler des points précis du corps afin de supprimer les blocages d’énergie. « Je commence toujours par un diagnostic du corps dans une vision holistique pour établir un bilan en raisonnant à partir de la théorie du yin et du yang, explique Vincent Mource, acupuncteur à Rouen (76). Je vais ensuite me concentrer sur le mal de dos en interrogeant le praticien sur sa douleur et son aggravation selon des facteurs extérieurs : quel procédé la soulage (chaleur, position…) ? À quel moment le mal de dos s’intensifie-t-il particulièrement ? »
L’acupuncture est souvent complétée par l’usage de moxas (un bâtonnet d’armoise consumé au-dessus de points précis afin de réchauffer la zone et donc de détendre les muscles), par des massages ostéo-articulaires et énergétiques appelés « tui-Na » qui rétablissent la mobilité et la circulation énergétique et par la pharmacopée (décoction à base de plantes d’origine chinoises qui traitent les causes internes de la pathologie). « Pour la médecine traditionnelle chinoise, toute douleur vient d’une stagnation d’énergie. Il s’agit donc de traiter le fond du problème à l’inverse des traitements symptomatologies. » Deux à trois séances sont conseillées avec un suivi correctif de la posture au travail.
Soigner la cause : la réflexologie
La réflexologie vise à mobiliser les processus d’autoguérison du corps. Elle se pratique en exerçant une pression soutenue, avec le bout des doigts, sur des zones ou des points réflexes situés sur les pieds, les mains et les oreilles qui correspondent à des organes ou des fonctions organiques. La réflexologie n’est pas une technique de massage même si elle peut y ressembler à première vue. Elle est davantage apparentée au shiatsu ou à l’acupuncture. Le Dr Laurent Dillinger nous met en garde sur le choix (en l’absence de diplôme officiel) d’un bon professionnel de réflexologie – ou du kinésiologie – et à la qualité de ses soins.
Le médecin traitant peut mettre à disposition une liste de contacts « sérieux ». Jean-Claude Guyard de l’EKMA (École de kinésiologie et méthodes associées) précise : « Dans une conception sérieuse et recommandable, les kinésiologues s’assurent qu’il n’y a pas de charge émotionnelle liée à cette douleur, accentuée par une mauvaise posture professionnelle. L’adaptation entre le problème de l’orthodontiste et la réponse apportée est alors optimale. »
Le mot de la fin
Le choix de la méthode de soin s’apparente à un labyrinthe… L’association de traitements impliquant des « philosophies thérapeutiques » différentes mais capables de coopérer dans l’intérêt du malade se met en place. Le Dr Thierry Janssen, auteur de La Solution intérieure (Fayard,2006) et de La maladie a-t-elle un sens ? (Fayard, 2008) résume que « l’enjeu est de traduire les concepts holistiques des médecines alternatives et complémentaires dans les termes de la culture scientifique moderne. » Il est fort probable que l’avenir nous réserve des solutions plus globales au mal de dos chronique.
S’entretenir à l’année
Le sport
La natation sur le dos en eau chaude est un excellent exercice. Le stretching, le vélo, l’aviron, le jogging sont bénéfiques car ils renforcent la musculature de l’abdomen qui représente 30 % des piliers du dos. Tous les sports exigeant des mouvements et changements de pied brusques, comme le rugby ou le football ainsi que les sports asymétriques comme le tennis, le golf, le squash, le badminton sont à éviter, car grands pourvoyeurs de douleurs sciatiques.
La méthode Pilates
Elle vise tous les groupes musculaires et permet de retrouver la plénitude respiratoire (côtes, ventre) ainsi qu’une posture correcte du squelette. Cette méthode prévient des pathologies articulaires par l’équilibre entre tension et relâchement, par un élan énergétique et une détente en combinant l’approche orientale (yoga/respiration) et occidentale (tonus/force musculaire). Facile à mettre en application, elle demande une assiduité aux leçons pour en acquérir les mouvements précis.
Le yoga
Selon une étude américaine publiée dans The Annals of internal medecines, le yoga est particulièrement conseillé une à deux heures par semaine pour apaiser les douleurs lombaires, car il est un moment de développement de la « conscience posturale » et de relâchement des tensions. « Durant les postures, Les muscles sont sollicités, étirés, contractés gagnant ainsi en souplesse et en tonus musculaire. Comme toute activité physique, une pratique régulière du yoga contribue également à ralentir la décalcification des os, détaille Andrée Maman, médecin radiologue et présidente d’honneur de la Fédération nationale des enseignants de yoga. En intégrant son schéma corporel et une meilleure statique vertébrale, le yoga améliore le maintien. »